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1Monsegneur, je vous ay escrit du XIXe, puys lequel jour
2je n’ay guière habandonné ou le lict ou la chambre,
3d’ung peu de maladie que j’ay heu, don je me sens,
4Dieu mercy, tant allegé que demain, avec son ayde, je
5reprendray l’air et le pavé. Du mesme jour que
6je vous escrivis, Il s’eleva ung bruict par ceste ville
7universellement que l’on vouloit encor se jetter sur
8les reliques de la huguenauderie par le commandement
9du roy, que le commung disoit estre party pour leur laisser
10faire. Mais, Monsieur de Nevers, qui estoit demeuré
11en ceste ville, manda en son lougis, dans le Louvre, messieurs
12du conseil privé, présidentz de la cour de parlement,
13prévost des marchantz et eschevins de ceste ville, qui
14firent faire si bon guet toutte la nuict qu’il ne s’en est
15ensuivi aucung désordre que le saccagement d’une boutique
16de ferronnier. Sans ce bon ordre, les mains chatouilloint
17à assez de gens, non de courir sur les reliques des Huguenotz,
18mais sur tout ce qu’eust vallu le prendre et attraper,
19et pense-on qu’il s’en fut ensuivi ung saccagement misérable
20des meilleures maisons de ceste ville. Monsieur le légat
21faict son entrée ce jourd’huy en ceste ville. Le roy est
22encor à Fontenay-en-Brie et la royne sa mère à Monceaux.
23Messieurs d’Évènes et de Laval ne sont encor non plus de
24retour. Je me voy embarqué encor yci pour cest yver,
25dont messieurs du pays m’ont prié ne bouger. Je leur escris
26de demander creue d’ung second conselier ecclesiastiq, attendu
27qu’il y a deux chambres au parlement. J’en escris aussi
28à messieurs d’Ambrun et de Grenoble, pour n’estre veu
29mespriser en cela leur faveur. Je verray la volonté des
30estatz sur ce poinct, puys je me résouldray de la mienne.
31[v] Si elle va là, je m’en feray pourvoir. Mais je crains qu’il
32ne faille du moins estre in sacris pour éviter les dispenses
33que l’on poursuit après, auquel poinct je ne me pourray
34pas résouldre aisément, mesme que j’ay sceu que mon frère
35a perdu ung de ses deulx filz. Si je passe oultre et qu’il
36me faille financer, je regarderay que vous en aurés les
37deniers, s’il m’est possible, car je n’auray guières d’envieux
38sur cest office. La royne pourtant m’a promis, par vostre
39recommandation, de parler au roy de me donner et l’office
40et la finance. Si les estatz n’estoint chargé de tant
41d’affaires, j’en eusse peu tirer quelque ayde. Je n’ay point
42de novelle que monseigneur le prince dauphin soit party
43de Saint-Fergeau pour faire son voyage en Daulphiné,
44bien que le sieur de Bazemont me promit m’advertir de son despart.
45Voz petitz escholiers se portent bien. Je présente mes très humbles
46recommandations à votre bonne grâce et de celle de monsieur de La Roche. Je prie Dieu,
47Monsegneur, qui vous conserve en très longue et
48heureuse vie. De Paris, ce XXIIIe novembre 1572.
49Votre très humble serviteur
50S de Boczosel
51J’ay sceu que madame arriva à Grenoble le XIIIe
52en très bonne santé, de quoy je loue Dieu. Je luy baise
53les mains très humblement. Elle prendra, s’il luy plait,
54les lettres que je vous escris pour siennes. A mon acquit
55envers elle, si elle a quelque conficture de reste, je
56la supplie en faire part à madamoiselle de Chastelar
57ma mère.